La leishmaniose
*Un complément d’information introductif est proposé sur les maladies vectorielles, les vecteurs et leurs moyens de lutte dans une autre fiche : « Les maladies vectorielles
rencontrées en France ».
La leishmaniose canine est une maladie infectieuse liée à la transmission, par piqûre de phlébotome (minuscule moustique), d’un protozoaire flagellé : Leishmania infantum. Cette
zoonose (maladie commune à l’homme et à l’animal), dont le réservoir principal est le chien, est en constante augmentation en France.
L’expression clinique de la leishmaniose est polymorphe et donc difficile à diagnostiquer. C ’est une maladie grave, pour laquelle il n’existe pas de traitement curatif chez le chien. Le
premier cas canin a été découvert à Marseille, en 1913.
Chez l’homme, l’infection a des répercussions cutanées ou viscérales. Environ 2 millions de nouveaux cas humains sont répertoriés chaque année dans le monde, la mortalité étant
estimée à 60 000 cas par an. Elle est reconnue comme maladie opportuniste courante des patients immunodéprimés ou toxicomanes. Cette maladie fait partie des maladies
tropicales reconnues par l ’OMS puisqu’on la rencontre essentiellement sous les tropiques, mais elle ne s ’y limite pas. En France, il s’agit d’une zoonose rare (en moyenne 20 à 25 cas
par an).
Répartition géographique et épidémiologie
En France, Le Sud en général est touché. Cependant avec le réchauffement du climat, la maladie s ’intensifie dans le sud et s ’étend vers le nord (région parisienne, Agen, Touraine,
Alençon, Clermont -Ferrand et Bourg-en-Bresse). En Europe, la leishmaniose sévit principalement sur le pourtour méditerranéen.
La leishmaniose canine est en augmentation depuis plusieurs années en France comme en Europe. En 2006, la prévalence à l ’échelle du territoire est de 4.1 ‰, alors qu ’elle peut
atteindre 17.7 ‰ dans certains départements comme les Pyrénées-Orientales.
Les phlébotomes sont de petits moustiques velus (2 à 4 mm), lancéolé et bossus, de couleur jaunâtre qui volent en silence. Ces insectes ont un mode de vie nocturne : ils sont
particulièrement actifs au crépuscule et la nuit. Les phlébotomes mâles et femelles se nourrissent de sucs végétaux. Les sources directes de parasites sont représentées par les
phlébotomes femelles infestés qui prennent un repas de sang nécessaire à la reproduction. Elles sont infestantes au terme d’un temps de latence de 15 jours environ à 15°C
(multiplication du parasite dans leur estomac), et le restent toute leur vie. On les rencontre dans les zones rurales ou les aires boisées des villes (jardins et parcs). Les phlébotomes
sont nombreux dans les zones peu ventées et abritées, où les variations de température sont faibles et le degré d’hygrométrie élevé. La saison classique des phlébotomes s ’étend
d’avril-mai à septembre-octobre mais cette saison peut varier en fonction des conditions climatiques. Depuis quelques années, les phlébotomes apparaissent de plus en plus tôt dans
la saison (dès le mois de mars). L’hiver, les moustiques disparaissent mais les chiens contaminés et devenus réservoirs de la maladie permettent à la leishmaniose de
réapparaître chaque année avec les beaux jours.
Parmi les 800 espèces de phlébotomes, 80 sont susceptibles de transmettre la leishmaniose. En France, ce
moustique s’attaque principalement aux chiens. Les chats sont très peu concernés par la leishmaniose car ils
se révèlent naturellement plus résistants à la maladie.
Les leishmanies sont des protozoaires, c’est -à-dire des eucaryotes unicellulaires qui se distinguent des
bactéries par la présence au sein de la cellule d ’un matériel génétique protégé dans le noyau et d ’une
faculté de reproduction sexuée. Les eucaryotes sont à l’origine de l ’ensemble du monde vivant (végétal et
animal). Le cycle de développement complet des leishmanies nécessite le passage par un hôte mammifère (le
chien) et un hôte arthropode vecteur (le phlébotome).
La leishmaniose canine peut toucher les chiens de tout âge. La période de latence de la maladie pouvant
atteindre plusieurs années. Aucune prédisposition raciale n ’est retrouvée dans la leishmaniose canine.
Les leishmanies ne résistent pas dans le milieu extérieur, ce qui fait que la contamination directe est
impossible. La contamination par transfusion est quant à elle envisageable, de même la transmission de la mère
au foetus est expérimentalement prouvée.
Pathogénie
Pour qu’un chien soit infecté, il faut plusieurs piqures itératives de phlébotome infecté.
Ensuite, les leishmanies colonisent les cellules du système immunitaire (macrophages, histiocytes et monocytes) et s ’y multiplient. On les retrouve donc dans le derme, les ganglions
lymphatiques, la moelle osseuse, la rate, le foie, le liquide céphalorachidien. Les leishmanies persistent dans l ’organisme grâce à des mécanismes d ’échappement du
système immunitaire encore mal connus. Le passage d ’un état asymptomatique vers un état pathologique résulte de la rupture d ’un équilibre établi entre le parasite et le système
immunitaire de l’hôte.
Signes cliniques
L’incubation est variable et très longue, de l’ordre de plusieurs semaines à plusieurs années.
La forme classique est très protéiforme du fait de la multiplicité des tissus parasités. Elle associe symptômes généraux et cutanéo-muqueux, atteinte du système immunitaire et
modifications biologiques et sanguines. Les signes généraux sont de l’abattement, un amaigrissement et une fièvre modérée. Les lésions cutanées sont une perte de poils diffuse, ne
démangeant pas, symétrique, surtout autour des yeux et formant des « lunettes », un épaississement des coussinets et de la truffe, une pousse anormale des ongles, des « pellicules »
et parfois des ulcères et des nodules. On rencontre également une augmentation de la taille des ganglions, de la taille de la rate, une atteinte rénale, une conjonctivite. D ’autres
signes, articulaires, cardiovasculaires, digestifs, respiratoires, nerveux ont également été décrits.
Le tableau clinique peut être compliqué par des co-infections, en particulier dermatologiques (gale, démodécie, autres maladies vectorielles).
Diagnostic
Le diagnostic clinique de leishmaniose est difficile.
Au cabinet vétérinaire, le diagnostic de certitude repose sur la mise en évidence microscopique des leishmanies. Plusieurs prélèvements (peau, ganglions, moelle osseuse) sont
souvent nécessaires. Les résultats de l’examen du prélèvement sont variables car la répartition du parasite n’est pas uniforme. Des tests sérologiques rapides peuvent être proposés
par votre vétérinaire.
D’autres techniques, réalisées en laboratoire (PCR, mise en culture, sérologie) permettent d’affiner le diagnostic.
Pronostic
Le pronostic, c’est-à-dire l ’ensemble des informations permettant d’apprécier aussi précisément que possible les chances de guérison et tous les risques et complications possibles,
est très variable d’un sujet à un autre.
Le choix de traiter un chien atteint de leishmaniose doit prendre en considération :
- Le caractère zoonotique de la maladie (possibilité de transmission à l ’homme) car le chien constitue dans nos régions le réservoir du parasite.
- Les lésions et les atteintes organiques de l ’animal (en particulier l’insuffisance rénale et les troubles sanguins).
Dans tous les cas, la leishmaniose est une maladie grave, dont le traitement, long et coûteux, ne permet souvent qu’une rémission transitoire, les rechutes étant fréquentes.
Traitement et prévention
Les récurrences de la maladie clinique sont fréquentes après le traitement. Il n’y a pas de guérison parasitologique de la maladie, c ’est-à-dire que le chien reste porteur à vie du
parasite. Le traitement vise à diminuer les signes cliniques. Le traitement repose sur une bithérapie (association de deux médicaments dont un est administré par voie injectable
au quotidien) pendant au mois 4 semaines. Les effets secondaires sont fréquents (toxicité hépatique et rénale). Le traitement est ensuite allégé pour limiter les effets secondaires
mais poursuivi à long terme. Les médicaments utilisés sont coûteux.
La prise en charge thérapeutique des troubles rénaux, cutanés et oculaires est nécessaire. Le chien doit être régulièrement suivi par le vétérinaire pour éviter les rechutes et
combattre les affections associées (insuffisance rénale, anémie).
Pour protéger au mieux votre compagnon lorsqu ’on réside dans ces régions ou lors de déplacement dans ces zones (week -end, vacances, etc.), il faut veiller à ce qu ’il reste à
l’intérieur d ’une maison du soir à l ’aube entre mai et octobre. En l’absence de vaccin commercialisé à ce jour en France, seul le recours aux insecticides peut prévenir les piqûres
infectantes de phlébotomes. Deux produits sont principalement utilisés en France : la deltaméthrine, disponible sous forme de collier dont l ’action perdure 5 mois et la
perméthrine, disponible sous forme de pipette en spot on, à renouveler tous les mois.
Devant le développement de cette maladie et des conséquences pour l ’homme et l ’animal, l’OMS recommande l’usage systématique d’un collier imprégné de deltaméthrine pour
prévenir l’extension de ce fléau.
Un vaccin contre la leishmaniose a été commercialisé en France en 2011 ; il nécessite 3 injections, après l’âge de 6 mois, la première année puis des rappels annuels. Il permet de «
réduire le risque de développer une infection active et une maladie chronique », c’est-à-dire qu’il ne protège par complètement votre animal contre le parasite. « La vaccination ne
doit pas empêcher de prendre d ’autres mesures pour réduire l’exposition aux phlébotomes » (notice du vaccin).
La leishmaniose est une maladie grave pour le chien et l’homme.
La prévention insecticide est un moyen de lutte peu coûteux et efficace.